existe depuis 10 000 ans. L’homme manipule son environnement afin de satisfaire ses besoins alimentaires. Pour cela il
sélectionne
les espèces à l’état sauvage et les
domestique
peu à peu afin d’obtenir les caractéristiques souhaitées (meilleures qualités gustatives, meilleures récoltes, etc.). Les plantes ainsi sélectionnées utilisent donc toute leur énergie à la croissance de leurs
parties comestibles
. Cette caractéristique n’apporte aucun avantage concurrentiel dans la nature, et ces espèces ne pourraient plus rivaliser avec les espèces sauvages, elles dépendent alors des interventions de l’agriculteur. Entre les semis et la récolte, il faut donc nourrir les plantes (apporter des engrais, azote, potassium, phosphore, etc.) et
les protéger
par des
pesticides
.
Les pesticides ont contribué à la
révolution verte
dans les années 60, permettant une
croissance démographique sans précédent
(population mondiale doublée en un peu plus de 50 ans). Grâce à eux la France est passée du statut d’importatrice de nourriture à celui d’exportatrice. Ils sont aujourd’hui indispensables pour faire face à la demande alimentaire mondiale (7,5 milliards d’humains actuellement, 9,6 milliards à nourrir en 2050).
Les pesticides permettent d’
optimiser l’usage des terres agricoles
: moins de compétition avec les mauvaises herbes pour le soleil, l'eau, les nutriments, moins de pertes de productivité dues aux maladies et insectes, donc moins de surface arable à exploiter, moins de gaspillage de ressources, d’eau, d’énergie, moins de labour, donc moins d’érosion des sols, de carburant et d’émission de CO2. Également, et ça n’est pas négligeable, moins de peine, donc plus de temps pour d’autres activités. En agriculture comme en urbanisme,
mutualiser et concentrer les infrastructures est une démarche écologique
, puisque qu’il en résulte moins de transports, moins de pertes d’énergie, et moins de ressources consommées.
Sans protection
des plantes, c’est en moyenne
30 à 50% de perte de production
.
Les pesticides permettent des productions de nourriture contenant souvent
moins de toxines
diverses. Leurs avantages sont plutôt sous-estimés par le grand public alors que les risques pour la santé sont surestimés.
Les pesticides présentent évidemment aussi des risques, comme l’a montré l’épisode du
DDT
, pesticide dont on n’a pas su mesurer assez vite l’impact sur l’environnement, et qui s’est avéré
cancérigène
et
reprotoxique
, et fut interdit en 1973. (Cf. Rachel Carson « le printemps silencieux », 1962). Cependant ce scandale date de presque 50 ans (à une époque où
on pulvérisait dix fois plus
) et la conscience écologique et les connaissances des impacts environnementaux ont progressé. Aujourd’hui, la manière la plus pertinente de voir les choses est de mesurer objectivement, comme pour les vaccins, le
Les pesticides utilisés pour protéger les cultures sont des produits phytopharmaceutiques (herbicides, fongicides, insecticides, acaricides, régulateurs de croissance ou répulsifs) qui contiennent au moins une
substance active
(agent chimique ou biologique / micro-organisme) qui permet de lutter contre un nuisible. Un shampoing antipoux, une citronnelle anti-moustiques, un collier antipuce, sont des pesticides.
Depuis des centaines de millions d’années, les pesticides sont le
moyen naturel de défense
de la majorité des plantes. La caféine est le pesticide du caféier, la nicotine celui du plant de tabac. La menthe, le romarin, l’origan, le basilic sont des répulsifs contre les insectes, grâce à leurs composés chimiques.
Les
plantes domestiquées
sont l’exception, elles contiennent naturellement
peu de pesticides
, puisqu’elles ont été sélectionnées sur des milliers d’années pour ne plus être toxiques. Malgré tout, certains produits de grande consommation (pommes de terre, tomates, fruits, rhubarbe, etc.) contiennent toujours naturellement des molécules qui sont pesticides pour les humains (solanine, formaldéhyde, acide oxalique, etc.) sans toutefois qu’une consommation ordinaire et variée ne pose de problème. Même une simple courgette, à l’état sauvage, peut être mortelle si ses mutations naturelles lui auront à nouveau permis de produire trop de cucurbitacines.
L’effet pesticide
dépend de la dose
, et la dose toxique n’est pas la même que l’on soit insecte ou humain.
A moins qu’il ne soit la bombe atomique, un produit n’est jamais pesticide par essence, en soi, pour toute forme de vie, il l’est pour certaines catégories ou types d’organismes. La vision
essentialiste
et binaire qui consiste à voir certains produits comme étant diaboliques (et d’autres comme étant idylliques) n’est pas réaliste.
Le
chocolat
est un pesticide extrêmement puissant… pour les
chiens
.
Le
téflon
est un pesticide, mortel par
hémorragie pulmonaire
… pour les
perruches
.
La
mort aux rats
(coumaphène) est un pesticide… mais c’est aussi un des anti-coagulants les plus prescrits au monde pour
éviter la formation des caillots et les AVC
chez les humains.
L’
oxygène
qui nous est indispensable, est aussi un pesticide… pour toutes les
bactéries anaérobies
.
Un
herbicide
n’est efficace… que sur l’
herbe
.
L’effet pesticide dépend
de qui l’on est
, l’effet pesticide est
contextuel
, et variable selon de nombreux facteurs.
Tous les pesticides ne se valent pas et n'ont pas les mêmes caractéristiques, chaque pesticide doit être étudié
, 250 millions d'euro de recherche et développement, des
procédures d’autorisation qui durent 10 ans
, et une homologation qui peut être retirée à tout moment si les risques sont avérés.
C’est l’
EFSA
(European Food Safety Authority) qui évalue la
sécurité des substances actives
en fonction de leur toxicité (
DARf
), des teneurs escomptées dans les aliments, des habitudes de consommation alimentaire Européennes, et qui ensuite propose des limites légales (
LMR
).
DARf
-
Dose Aiguë de Référence
: quantité estimée pouvant être ingérée sur une courte période, généralement un repas ou une journée, sans présenter de risque pour la santé.
LMR
-
Limites Maximales de Résidus
: concentration la plus élevée légalement permise d'une substance active dans ou sur des aliments destinés à l’alimentation humain ou animale.
L’EFSA est constituée de plusieurs groupes scientifiques, chacun composé des
experts du domaine
. Ils sont
indépendants
, ne représentent aucun pays, organisme ou secteur économique. Ils œuvrent en collaboration avec de nombreuses agences européennes, EMA, ECHA, CEPCM, AEE, etc.
L’
ANSES
prend les décisions au niveau national en France, elle ne peut pas autoriser une substance interdite au niveau européen mais elle
peut interdire localement une substance autorisée an Europe
. Elle délivre les
autorisations de mise sur le marché
(AMM), qui sont valables 10 ans et renouvelables.
L’usage des pesticides est règlementé et tout est mis en œuvre pour se diriger vers une
agriculture raisonnée
, utilisant le strict nécessaire de pesticides. L'Union européenne dispose du système d'autorisation des substances actives pour usage dans les pesticides
le plus strict au monde
.
Depuis 2008 est mis en place en France le
plan Ecophyto
, visant à
réduire l’utilisation
des produits phytosanitaires
de 50%
à horizon 2025.
Des plans similaires sont menés à l’échelle Européenne : Le projet de règlement
REACH
de l’Union Européenne vise à protéger la santé des consommateurs et l'environnement contre les risques liés à l'utilisation des produits chimiques susceptibles d'être néfastes. Ils devront être
remplacés par des produits alternatifs
, moins nocifs. Les autorisations seront limitées à cinq ans.
Quelques
chiffres
qui montrent que l’utilisation des pesticides n’a rien de « massive et déraisonnée » :
La
quantité
de pesticides utilisés en France :
120 500 tonnes par an en 1999
, 71 600 tonnes en 2006,
66 000 tonnes en 2016
.
Il existe
1129 substances actives référencées
. En 1993, un millier de ces substances actives étaient autorisées. Les programmes de réexamen des substances actives phytopharmaceutiques font qu’aujourd’hui en Europe, seules les 423 substances actives les moins dangereuses sont autorisées (et seulement
310 en France
). L’exposition de la population générale aux résidus de pesticides est étroitement surveillée.
Dans les pays de l’UE, un pesticide n’est accepté que s’il est
Indépendamment de leur toxicité, ce que l’on doit craindre des pesticides dépend avant tout de
la dose
à laquelle nous sommes
exposés
(tout comme pour l’alcool, les UV, les radiations, etc.). Le rapport EFSA de 2013 indique que
97% de nos aliments contiennent des résidus de pesticide dans les limites autorisées
(54.6% des 81 000 échantillons analysés ne contiennent même aucun résidu détectable).
Le détail des quantités de résidus par pays, par aliment, etc. (en % de LMR, les limites maximales de résidus légalement permises) est disponible sur le site de l’EFSA.
Mais que représentent concrètement ces
résidus
?
Prenons pour exemple le glyphosate dont la dose journalière admise (DJA) est fixée à
0,3 mg / kg / jour
, et pour lequel un récent rapport d'évaluation conclut que l'
exposition des consommateurs
à ces résidus est en moyenne
inférieure à 2% de la DJA
.
Ainsi, un individu de 75 kg ingère en moyenne par son alimentation moins de 2% de 0,3 mg * 75, soit moins de
0,00045 g
par jour de
glyphosate
. En comparaison, quand nous buvons un verre de vin (12 cl) à 13°, nous ingérons
15.6 g
d'
alcool
.
En clair,
pour arriver à la même dose de produit cancérigène que celle contenue dans un seul verre de vin
, il faut ingérer (15,6 g / 0,00045 g) soit
34 666 jours de nourriture
. Presque 95 ans d'alimentation !
Et encore, c’est en considérant que les dangerosités sont égales, ce qui n’est pas le cas, puisque l'alcool est un cancérogène avéré (classé 1) contrairement au glyphosate (classé 2A).
Chaque personne ayant bu ne serait-ce qu'
un seul verre de vin
dans sa vie n'a
plus aucune raison rationnelle de s'inquiéter des pesticides
.
Choisir un
vin bio
pour éviter un produit cancérigène est une démarche
complètement irrationnelle
.
La quantité totale de résidus de tous les pesticides que l’on pourrait retrouver dans un repas représente au maximum quelques milligrammes. A côté de ça, avec une alimentation normale, nous ingérons quotidiennement
1,5 g
de
substances végétales naturelles mais potentiellement toxiques
(acide caféique, d-limonène, safrole, estragol, psoralène, acrylate d’éthyle, sinigrine, hydrazino-benzoate, sésamol, acétate de benzyle, acide chlorogénique, hydroquinone, furfural, etc.). Bien heureusement, pour l’un comme pour l’autre, c’est
la dose qui fait le poison
.
Concernant la teneur en glyphosate dans l’eau potable, elle est de l’ordre de 0.1 à 2 µg/l d’eau.
Pour
est la substance active la plus utilisée dans le monde pour les
herbicides à large spectre
. C’est une des molécules les plus étudiées et contrôlées, il fait l’objet à lui seul de
plusieurs milliers d’études
.
Il existe plus de
600 produits commerciaux à base de glyphosate
.
Il n’est cependant
pas le pesticide le plus utilisé
: en France, la consommation annuelle est de 8 000 tonnes, contre 15 000 tonnes / an pour le
soufre
(majoritairement utilisé en viticulture, arboriculture, et agriculture biologique).
Son
mode d’action
:
Le glyphosate est un analogue d’acide aminé avec un mode d’action très spécifique, il
inhibe une enzyme
(la EPSPS) qui en temps normal permet à la plante de synthétiser certains de ses acides aminés aromatiques. Autrement dit,
il interrompt l’un des mécanismes de la croissance
des plantes. Son intérêt est qu’il est non sélectif, il cible un panel très large de plantes, tout en n’ayant
aucune influence sur les insectes et les animaux
(dont l’homme) qui n’emploient pas ce mécanisme chimique que cible le glyphosate. Le glyphosate en lui-même n’est d’ailleurs pas un désherbant efficace, il désherbe même particulièrement mal, c’est pourquoi les formules le contenant font également appel à des
surfactants
(des substances
tensioactives
) dont le but est d’aider le glyphosate à pénétrer les plantes.
Son
impact sur les sols
:
Le glyphosate est l’herbicide pour lequel les
risques de dispersion
dans l’environnement sont
les plus faibles
: comparé à d'autres pesticides fréquemment utilisés (métazachlore, métamitrone, sulcotrione) il a une
rétention élevée
: il se fixe dans les sols à hauteur de 60% (contre moins de 10% pour les autres) et présente donc l’avantage d’une
faible mobilité
, réduisant les risques de contamination des eaux souterraines. Il a également une
faible persistance
dans les sols (biodégradabilité de quelques semaines) contre plusieurs mois pour la plupart.
Le point d'attention est donc plutôt à situer au niveau d’un des produits intermédiaires de dégradation, l’
AMPA
, qui lui a une persistance supérieure et pourrait présenter des risques potentiels pour l’environnement (mais tout comme les produits de dégradation des autres herbicides, M4 pour le métazachlore, CMBA pour la sulcotrione, etc.). L’AMPA est finalement minéralisé naturellement en CO2 et en éléments simples et non toxiques, comme l’eau, l’ion phosphate etc.
A noter que
l’AMPA est aussi le produit de dégradation des aminométhylène-phosphonates
, qui sont utilisés dans les systèmes de réfrigération et de refroidissement des moteurs, de traitements des eaux de refroidissement, dans les
détergents industriels
et domestiques, les
lessives
, etc. Une forte teneur en AMPA n’est donc pas nécessairement le signe d’une pollution par des herbicides.
La biodégradabilité est surveillée, la directive 91/414, qui encadre l’évaluation et l’autorisation des produits phytopharmaceutiques prévoit bien que les produits persistants (ou non-dégradables) ne peuvent pas être autorisés.
Le développement de
résistances
:
La nature s’adapte par
sélection naturelle
: ne se reproduisent que les plantes qui arrivent à survivre dans leur environnement, et fatalement donc, les plus résistantes aux pesticides. Tout produit, dès lors qu’il est utilisé, est susceptible de favoriser l’apparition de résistances (tout comme un mauvais usage d’antibiotiques peut être à l’origine de bactéries résistantes). Ce problème n’est
pas spécifique au glyphosate
, mais celui-ci étant l’herbicide le plus utilisé, il est évidemment à l’origine de phénomènes de résistance.
Autre exemple de résistances : De nombreuses variétés de tournesol actuelles (il ne s’agit pas d’OGM) ont été
sélectionnées pour tolérer
un type d'herbicide «
inhibiteurs de l'ALS
». Les agriculteurs ayant recouru massivement à ces herbicides, de nombreuses mauvaises herbes ont évolué et y sont désormais résistantes. Les mauvaises herbes devenues résistantes aux inhibiteurs de l'ALS sont même
plus nombreuses que celles résistantes au glyphosate
.
Ces phénomènes de résistances sont bien connus et
anticipés
.
Sa
toxicité
:
Pour mieux appréhender ces notions de toxicité, il est suggéré de lire le dossier « naturel & chimique » notamment la partie « Comment juger la dangerosité ».
La
dose létale médiane
(
DL50
) du glyphosate est
1600 mg/kg
, soit pour un adulte de 75 kg, une dose mortelle située à environ
120 g
ingérés. Au niveau toxicité, le glyphosate est
8 fois moins toxique que la caféine
(mortelle à environ
12 g
ingérés), que la nicotine, ou que de nombreux produits contenus naturellement dans l’alimentation. Il est d’une toxicité équivalente à celle de la bouillie bordelaise (
2000 mg/kg
).
Mais la toxicité seule d’un produit ne permet pas de déterminer si son usage est possible :
Le
paracétamol
a une DL50 équivalente au glyphosate ou à la bouillie bordelaise (2400 mg/kg).
Les
pommes de terre
contiennent de la
solanine
, qui est d’une toxicité identique à l'
arsenic
(DL50 de 10 mg/kg), c'est-à-dire
160 fois plus toxique que le glyphosate
.
Pourtant personne ne pense à
interdire le paracétamol ou les pommes de terre
. Tout dépend des doses auxquelles nous sommes soumis.
La dose fait le poison
.
La
dose journalière admise
(
DJA
) est la dose considérée comme ne pouvant avoir aucun effet toxique sur la santé d’un humain, elle est elle-même calculée pour être bien inférieures à la DSE (dose sans effet). Celle du glyphosate est de 0,3 mg/kg, soit pour un adulte de 75 kg, une dose journalière tolérée dans l’alimentation de 22,5 mg, soit
une marge de sécurité par rapport à la DL50 d’un facteur 5000
. En comparaison, pour la caféine, cette marge de sécurité n’est que d’un facteur 70 (DL50 de 192 mg/kg, DJA de 200 à 400 mg/personne).
Les
limites maximales de résidus
(
LMR
) sont les concentrations les plus élevées légalement permises dans (ou sur) les aliments (destinés aux humains ou aux animaux). Elles sont calculées pour chaque produit, sur la base des doses journalières maximum admises, et en fonction des habitudes alimentaires. Selon le dernier rapport EFSA,
97.2% des aliments analysés sont conformes aux normes actuelles
, et les résidus de pesticides dans l’alimentation ne présentent aucun risque pour la santé (ces analyses portent d’ailleurs sur les produits bruts entiers, avec la peau des bananes ou oranges par exemple, sans lavage et/ou épluchage).
Le rapport précise en outre que les dépassements concernent tous types de cultures « les valeurs des LMR pour les produits de l’agriculture biologique dans l’UE sont identiques à celles des produits non biologiques »
Sa
cancérogénicité
:
C’est le
CIRC
(en anglais IARC - International Agency for Research on Cancer, une agence de l’OMS) qui détermine le
caractère cancérogène
des agents étudiés, et qui les classe en plusieurs catégories :
Classe 1
: les
cancérogènes avérés
, bien connus, avec un niveau de preuve solide.
Classe 2A
: les
cancérogènes probables
, avec un niveau de preuve limité sur l'humain, et avéré - mais limité - sur l'animal. Y figurent des produits essentiellement problématiques pour des
expositions professionnelles
et prolongées.
Classe 2B
: les cancérogènes possibles, avec des soupçons, mais pas de preuves formelles.
Classe 3
: les agents
inclassables
, pas de preuve, ni dans un sens ni dans l'autre.
Classe 4
: les agents
probablement non-cancérigène
(« probablement » car d’un point de vue logique il est absolument impossible de prouver que quelque chose n’existe pas). Dans ce groupe figure
une seule substance
, parmi les plus de 1000 analysées : le
caprolactame
.
Il faut bien noter que ce classement concerne le
degré de certitude
sur la
nature
cancérogène d’un produit, il répond à la question « a-t-on des preuves,
oui ou non
, qu’un produit est cancérogène ».
Il dit l’état du circuit (ON/OFF) et non son débit (1 µA ou 60 Ampères). Il est qualitatif et non quantitatif. Autrement dit, il mesure
le danger
(un requin peut-il être mortel, oui ou non) et non le niveau de
risque
(puis-je quand même me baigner en méditerranée).
Ainsi
la viande rouge et le plutonium ont un niveau de preuve similaire
, ils sont tous les deux classés « cancérogènes avérés », mais ça n’est évidemment pas le même risque.
Quelques
exemples
de la disparité des agents contenus dans ces groupes :
Classe 1
: Acétaldéhyde et éthanol des boissons alcoolisées, le tabac, les UV (les coups de soleil, utiliser une lampe à bronzer), la sciure de bois, la pollution atmosphérique, le plutonium, la noix de bétel, le papillomavirus, l’amiante, l’arsenic, être ramoneur, etc.
Classe 2A
: La malaria, le plomb,
les boissons chaudes
, le
glyphosate
, le
travail de nuit
, être
coiffeur
ou
barbier
(exposition aux produits de teinture), la fumée de bois, les
chips
, frites et grains de café (les acrylamides produites en cuisinant à haute température), la manufacture de verre, etc.
Classe 2B
: Le nickel, l’Aloe vera, les cornichons au vinaigre, être pompier, etc.
Classe 3
: La caféine, le paracétamol, etc.
Finalement, quasiment tout ce qui nous entoure est cancérogène à une dose ou une autre,
même l’oxygène
.
Le
formaldéhyde
par exemple, produit par notre propre corps, ou contenu naturellement dans les fruits (20 mg/kg pour les pommes, 60 mg/kg pour les poires) est un
cancérogène avéré
,
classe 1
. Et pourtant, pour que son ingestion soit clairement problématique, il faudrait qu’un individu consomme
plus de 4 tonnes de pommes par jour
.
La dose fait le poison
.
Le glyphosate est
classé 2A
par l’IARC depuis mars 2015, mais cette classification fait aujourd’hui débat.
La raison de sa classification 2A concerne les études sur le «
Lymphome Non Hodgkinien
», le seul type de cancer pour lequel, selon l’IARC, on aurait
potentiellement un lien de causalité
avec le glyphosate en contexte d’exposition professionnelle.
Pour tous les autres, on a autant d’études qui montrent que le glyphosate augmente le risque de cancer que d’études qui montrent que le glyphosate diminue le risque de cancer, autrement dit, une variabilité statistique due au hasard.
Concernant précisément le « Non-Hodgkin Lymphoma »,
seules 3 études sont prises en compte par l’IARC
, avec en majorité un intervalle de confiance incluant la valeur pivot 1, ce qui signifie une
preuve faible
. Et pour l’étude avec la preuve la plus forte (Eriksson, 2008), une lecture détaillée nous apprend que seules
47 personnes
, soit
2,4% de la population étudiée
, avaient en fait été exposées au glyphosate. Le fait que la population étudiée soit professionnelle et exposée sur de longues périodes à d’autres pesticides est un facteur confondant, qui limite grandement la portée de cette étude.
Le problème est qu’il existe
beaucoup d’autres études
qui
contredisent cette conclusion
, par exemple :
Une
étude de cohorte
(DeRoos, 2005) qui a suivi un groupe de 54 315 travailleurs agricoles, dont
41 000 exposés cette fois au glyphosate
. Les résultats sont à l’opposé : aucun lien entre le glyphosate et le lymphome non-hodgkinien, estimation moyenne inférieure à 1, intervalle de confiance englobant ce pivot 1.
Des
méta-analyses
(des revues systématiques, englobant plusieurs études de cohortes) confirment l’absence de lien. Ci-dessous une revue sur
21 cohortes
et études de cas contrôlées. « Notre revue n’a pas montré de schéma consistant d’associations positives indiquant une relation causale entre le total des cancers (chez les adultes et les enfants) et aucun site spécifique de cancers et d’exposition au glyphosate ».
Une
étude épidémiologique
de novembre 2017 sur une
cohorte de 54 251 agriculteurs
sur
plus de 20 ans
conclut qu’il n’y a pas d’augmentation de l’incidence des cancers, y compris les lymphomes non-Hodgkinien, chez les agriculteurs exposés au glyphosate. Les financements de l’étude sont tous d’origine publique, aucun des auteurs n’a de conflit d’intérêt déclaré.
Les principales
agences internationales
, reconnues et indépendantes, sont également critiques sur le classement 2A : l’
ECHA
(Agence européenne des produits chimiques), l’
EFSA
(Agence européenne de sécurité des aliments), l’
OMS
, l’ONU, la FDA, la
FAO
(Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture).
Toutes écartent le risque cancérogène du glyphosate
. Le
BfR
(Institut Fédéral allemand d’évaluation des risques) écrit le 30/05/2017 «
L’hypothèse selon laquelle les résultats basés sur les données scientifiques et les publications de l’ECHA et de l’EFSA ont été négligés, n’est pas correcte
». En 2015, le profil toxicologique du glyphosate est mis à jour par l’EFSA en «
cancérogène improbable
». En 2016, l’ANSES procède au renouvellement décennal d’autorisation pour le glyphosate, et modère les résultats du CIRC. Toutes les agences sanitaires mondiales affirment que le glyphosate est sûr (OMS, FAO, ANSES, EFSA, ECHA, BfR, ARLA, US EPA, NZ EPA, APVMA, FSCJ, etc.).
Devant le parlement européen, Bernard Url, directeur de l’EFSA en viendra même à reprocher au groupe de travail du CIRC de «
quitter le domaine de la science et d’entrer dans le domaine du lobbying
» pour avoir émis des conclusions sur une très faible sélection d’études, et pas des plus solides,
parmi les 800 études disponibles
, et voit derrière cette campagne les premiers signes de l’ère de «
la science Facebook
» (évaluer les réalités scientifiques
au nombre de Like
sur Facebook).
Comment une telle
controverse
a-t-elle pu se développer ?
Elle est principalement liée à l’implication depuis 2014 au sein du CIRC de
Christopher Portier
, en qualité de « consultant extérieur ». Malgré qu’il ne soit aucunement toxicologue, il semble avoir joué un rôle crucial dans le classement du CIRC, et ce malgré de forts
conflits d’intérêts
au sujet du glyphosate, qui ont sans doute motivé le « cherry-picking », la sélection arbitraire - et à charge - des 3 études les plus défavorables sur les centaines existantes sur le glyphosate.
Christopher Portier est un
militant écologiste américain
, salarié de l’Environmental Defence Found, une
ONG militante entre autres contre le glyphosate
. Il est aussi membre de la Health and Environment Alliance (HEAL), une organisation européenne qui lutte notamment contre les pesticides, et qui soutient l’initiative citoyenne européenne «
Les pesticides provoquent 500 morts par jour (Cf. Vandana Shiva)
Les pesticides sont responsables de 200 000 morts par an dans le monde (Cf. Elise Lucet / Cash impact)
C’est une vraie estimation de l’OMS datant de 1985, mais le chiffre a été
extrapolé à partir de 1000 décès
enregistrés
en 1979 au Sri Lanka
, et dus à des intoxications aigues, les 3/4 correspondant à des
suicides par ingestion volontaire
. L'auteur, le Dr. Jeyaratnam, qui a publié l’article dans la revue « British Journal Of Industrial Medicine », avait pour objectif d'alerter sur les problèmes de l'encadrement des pesticides dans les pays du tiers monde, précisant bien «
les intoxications aigües par pesticides ne constituent pas un problème majeur de santé dans les pays industrialisés
».
Aujourd’hui les cas mortels par ingestion de pesticides sont rarissimes. Aux USA par exemple, 1er consommateur mondial, on déplore sur la période 2006-2010, environ
5 décès par an
, pour des cas d’
exposition professionnelle
. En comparaison, il y a
150 accidents de travail mortels par jour aux USA
.
« 97% de nos aliments contiennent des résidus de pesticides » (Cf. Cash investigation)
C’est une affirmation qui provient du rapport EFSA de 2013, mais
la phrase est tronquée
, la suite est « dans les limites autorisées », ce qui change complètement son sens. 54.6% des 81 000 échantillons analysés ne contiennent même
aucun résidu détectable
. L’EFSA a également détecté 134 pesticides différents dans plus de 15% des aliments bio analysés.
Abeilles et néonicotinoïdes
«
Si l’abeille disparaissait de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quatre années à vivre
». C’est une citation souvent attribuée à Albert Einstein, mais qui en fait provient d’un communiqué de 1994 de « l’Union Nationale de l’Apiculture Française », un syndicat d’apiculteurs.
Il existe
20 000 espèces d’abeilles
, certaines sont en danger, mais toutes ne le sont pas.
Il y avait en 1961 dans le monde
50 millions de ruches
, en 2011 il y en a
80 millions
(une augmentation importante en Chine). En France entre 1994 et 2004 on comptait
1.3 millions de ruches
, et aujourd'hui
1.3 millions encore
.
Pour les abeilles
domestiques
: Le nombre de ruches dans le monde ne cesse d’augmenter, aux USA il est stable depuis 20 ans. On constate parfois un
syndrome d’effondrement des colonies
. Périodiquement les ruches se vident, et les apiculteurs doivent les reconstituer. Ce syndrome est multifactoriel (Cf. la crise de l’hiver 2006-2007 aux USA, un problème avant tout économique).
Pour les abeilles
sauvages
: Il est plus difficile de connaitre l’état des abeilles sauvages, cependant la corrélation régulièrement constatée est le changement d’environnement (par exemple une forêt transformée en champ). A Hawaï,
7 espèces
d’abeilles ont été classées menacées, le rapport mentionne que la cause est l’
urbanisation
, les changements dans leurs habitats, les inondations, ouragans, et prédateurs.
Pour déterminer les causes de mortalité, les autorités françaises ont mis en place un
dispositif de surveillance de mortalité des abeilles
. Selon l’ANSES, les principales causes de mortalité sont :
Pour
69%
, les
maladies
, principalement le
Varroa Destructor
(un acarien parasite originaire d’Asie), mais aussi des virus, la bactérie «
Loque américaine
», et le champignon «
Nosema
».
Pour
14%
, de
mauvaises pratiques apicoles
(mauvaise préparation des ruches pour la période hivernale, ou pénurie alimentaire) ou le
mauvais usage d’insecticides
par certains apiculteurs (le Fluvalinate, contre le Varroa, ou encore l’usage de produits interdits comme le Coumaphos).
Pour
5%
, des
intoxications par pesticides autorisés
(y compris Bio, Spinozad et Pyréthrine).
Le consensus, porté par L’INRA, le CNRS, l’ANSES, est que les
néonicotinoïdes
jouent un rôle très mineur.
Le glyphosate
n’est pas un néonicotinoïde
.
Du glyphosate détecté dans l’urine de 48 eurodéputés (Cf. Les amis de la terre & Générations futures)
Au niveau des quantités, l’étude précise « concentration la plus forte 1,8 μg/L pour le glyphosate et 2,6 μg/L pour l’AMPA ».
L’AMPA étant (entre autres) un résidu de dégradation du glyphosate, faisons la somme, et partons donc
pour être large
, d’un « équivalent glyphosate » de
4,4 μg/L
d’urine.
Notons déjà qu’on parle de
traces
à des teneurs de 1 ppm, or ici sont détectés 4,4 μg, soit 0,0044 ppm, donc des
microtraces
.
Notons également que le seuil de sensibilité actuel de la spectrométrie de masse est de 1 000 000 molécules. Dans ces 4,4 μg de glyphosate (masse moléculaire 169 g/mole, 1 mole étant 6,02*1023 atomes) on a donc 1*1016, c'est-à-dire 10 000 000 000 000 000 atomes, soit
10 milliards de fois les quantités que l’on est aujourd’hui capable de détecter
. Il n’y a donc rien d’étonnant à trouver du glyphosate chez tous les eurodéputés, ce serait le cas pour chacun de nous également.
Notons également que
4.4 μg
est une quantité plutôt anodine. A titre d’exemple, 1 litre d’eau contient naturellement jusqu’à
50 µg de cyanure
, 10 µg d’arsenic, 10 μg de plomb, etc.
Notons également que trouver du
glyphosate dans les urines
est finalement plutôt rassurant, car c’est bien
la preuve que le corps l’élimine
. Plus précisément, l’absorption orale du glyphosate est d’environ 20%. C’est le pourcentage qui passera dans l’organisme pour y être finalement dégradé et éliminé. Le reste, 80%, passera directement dans les selles
sans être métabolisé
.
Mais peu importe, quel
danger
représentent finalement ces
microtraces
?
L’absorption orale du glyphosate est de 20%. Postulons donc que ces 4.4 μg correspondent en fait à 5.5 μg
ingérés
, soit
0,0000055 g
.
La DJA (dose journalière admissible) du glyphosate est fixée à 0,3 mg/kg/jour, soit pour un individu de 75 kg, une dose journalière
admissible
de
0,0225 g
.
Cette dose ingérée correspond ainsi en réalité à 0,0225 g / 0,0000055 g =
qui a une incidence sur l'hypophyse, la thyroïde, la parathyroïde, le thymus, les glandes surrénales, les testicules, les ovaires, etc.
Par exemple :
La
pilule
, qui est le perturbateur endocrinien par excellence.
Le
paracétamol
et l’aspirine, qui inhibent la production de testostérone.
Les
pesticides organochlorés
(le DDT, interdit en 1973).
Le s
oja
, qui contient des isoflavones et de la génistéine, une
phyto-œstrogène
.
Le
pamplemousse
(un seul pamplemousse contient une dose de naringinine, perturbateur endocrinien antagoniste de l’estrogène, qui correspond à
500 000 fois la dose d’œstrogène chez une femme
)
L'
huile de neem
, un insecticide naturel utilisé en bio.
Au niveau européen,
564 produits
sont actuellement
suspectés
d’être des perturbateurs endocriniens, mais les preuves d’un effet avéré existent pour très peu d’entre eux.
Les perturbateurs endocriniens sont un
sujet d’inquiétude légitime
, car leurs effets pourraient suivre des
courbes dose/réponse non monotones
, c'est-à-dire ne pas être soumis au simple effet de seuil, et avoir des effets importants même à des doses faibles.
Les agents
les plus préoccupants
et à
étudier en priorité́
sont les phtalates, les retardateurs de flamme bromés (présents dans les plastiques pour leur donner de la souplesse ou dans les produits cosmétiques pour améliorer leur pouvoir de pénétration), le bisphénol A, certains pesticides (comme l’atrazine, interdite en 2003 en Europe), les détergents ou métaux, les phyto-œstrogènes, les mycotoxines.
Mais qu’en est-il des pesticides ?
Selon les
règlements européens
sur les produits de protection des plantes et sur les produits à activité biocide, des composés ayant des propriétés de perturbateurs endocriniens ne peuvent pas être autorisés, sauf exceptions pour certains pesticides dont l’exposition est «
négligeable dans les conditions d’utilisation réalistes
».
Le seul pesticide encore autorisé et identifié comme perturbateur endocrinien avéré (mais avec effet limité) est le
Chlopyriphos
. Ceux identifiés comme ayant des effets potentiels à faible dose (par exemple Amitrole, Fenoxycarb, Ziram, etc.) ont été interdits.
Concernant le
glyphosate
«
Il est peu probable que le glyphosate ait un effet potentiel sur la perturbation endocrinienne des voies dépendantes de la régulation oestrogénique