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Bio ou Monsanto


Aujourd’hui, l’
agriculture
ne fait plus travailler que
3.5% de la population française
(contre 30% en 1950) mais au pays du patrimoine culinaire, elle est plus que jamais au cœur des préoccupations, cristallisant nombre des inquiétudes que suscite notre mode de vie moderne. Pourtant
la sécurité alimentaire n’a jamais été aussi forte
, ce qui va immanquablement de pair avec une professionnalisation du domaine et des
réglementations
plus contraignantes. Pour certains se pose alors la question d’un « retour aux sources » débarrassé de l’industrie et de ses excès.

Quand vient le moment de se positionner, entre Bio et Monsanto, il est convenu pour rester membre de la fraternité des gens de bien, d’idolâtrer l’un et de stigmatiser l’autre. Mais envisageons un instant que le monde ne soit pas aussi binaire que dans un Walt Disney, et pour ceux suffisamment téméraires pour oser transgresser un tabou, essayons de regarder les faits de façon neutre, comme des gens libres de leurs actes.


Qu’est-ce que le bio ?


Le bio a pour objectifs une
production agricole respectueuse
de l’environnement, de la biodiversité, des ressources naturelles, du bien-être animal et surtout propose une méthode de production respectant la préférence de certains consommateurs pour des produits obtenus grâce à des
substances et des procédés « naturels »
.

Le bio concerne 5% de la superficie agricole de l'Union européenne. Les labels « bio » sont réglementés. En France, c’est le
label AB
, une certification définie par le
ministère de l'Agriculture
, qui conditionne l'obtention de l'appellation commerciale « agriculture biologique ».


Ce que garantit le
label AB
:
L'
absence d'OGM
(hors traces, le seuil de traces étant fixé à 0,9 %).
Le
respect de la réglementation
en vigueur en France.
Une
certification
, placée sous le
contrôle d’un organisme agréé
par les pouvoirs publics français.
Que l'aliment soit composé
d’au moins 95 % d’ingrédients issus du mode de production biologique
(pratiques agronomiques et d’élevage respectueuses des équilibres naturels, de l’environnement et du bien-être animal).

Les trois premiers points s’appliquent également à l’agriculture conventionnelle : même seuil de traces d’OGM, on doit respecter la réglementation française, et les modes de production sont encadrés et contrôlés. Tout cela ne nous apprend rien sur la spécificité du bio.
Le quatrième point est un
raisonnement cyclique
qui peut se résumer par la tautologie suivante : le « bio » doit être fait de « bio ».


Le
cahier des charges bio
nous apporte cependant quelques précisions :
Côté
agriculture
: les semences et plants employés doivent être «
bio
», et non issus d'OGM. On préconise des variétés résistantes aux maladies, la rotation et associations de cultures (pour stimuler la fertilité et l’activité du sol), le recyclage, le compostage, la plantation de haies, les engrais «
bio
» (selon une liste réglementaire) et la lutte
biologique
(selon des conditions définies) contre les parasites, maladies, et mauvaises herbes.
Côté
élevage
: animaux de race locale, nés sur l'exploitation ou issus d'exploitations certifiées
biologiques
, élevés en plein air, dans des élevages de taille limitée avec de bonnes conditions de vie en intérieur, pas de hors-sol, alimentation d’origine locale et
bio
. Les produits sanitaires de
phytothérapie
, d'
homéopathie
doivent être préférés aux médicaments vétérinaires allopathiques chimiques de synthèse (sauf cadre spécifié).
Dans des
conditions particulières
, telle qu'une offre insuffisante ou une catastrophe climatique, des
dérogations
peuvent être apportées à ces règles.

On retrouve ici ce fonctionnement
autoréférent
où le bio se donne pour définition d’être
exempt de ce qui n’est pas bio
. Pour être
bio
on doit utiliser des semences
bio
, des engrais et des pesticides
bio
, des animaux
bio
, d’élevage
bio
, nourris au
bio
.


Le label «
bio cohérence
» est mis en place en 2010, faisant suite à l’assouplissement en 2009 du label AB et à son alignement sur la réglementation européenne. Il se veut
plus exigeant
et doit permettre que le travail des producteurs les plus rigoureux soit reconnu. Ont participé à la création de ce label : la Fédération nationale d'agriculture biologique (Fnab), les Eleveurs bio de France, la société
Biocoop
, la coopérative
Biomonde
, le grossiste ProNatura. L’obtention du label bio cohérence exige, hormis l’obtention préalable du label AB :
Un taux d’
OGM
de 0.
Aucun ingrédient non
bio
dans les produits transformés (le label AB admet 5% d’ingrédients non bio).
Une pratique agricole
100% biologique
(le label AB autorise une faible mixité bio / non bio).
Une alimentation animale
100% biologique
(identique au label AB)
Que les produits bio cohérence ne soient
pas vendus en supermarché
(afin, selon le label bio cohérence, de ne pas cautionner un système qui tire les prix vers le bas, et qui pousse l'agriculture à devenir productiviste et industrielle. Ce label doit ainsi permettre de
meilleures marges
, et donc que les agriculteurs et éleveurs puissent être rémunérés équitablement).

Ce label est en effet plus strict, ici le bio doit aussi être fait de bio, mais cette fois de
100% de bio
!
A noter également que, ne pouvant être vendu en grande distribution, ce label se retrouve quasi exclusivement dans les magasins
Biocoop
et
Biomonde
, qui sont aussi les créateurs du label bio cohérence, et qui s’assurent de cette manière le cloisonnement du marché et la captation des producteurs.

Le bio a donc pour objectif le bien-être animal, le respect des écosystèmes, et une production qui se différencie principalement par l’utilisation d’engrais et de pesticides bio, ou « naturels » (sur ce sujet, voir le dossier « Naturel & chimique » qui montre que l’origine d’un produit ne permet pas de prédire sa dangerosité).





Quels pesticides sont autorisés en bio ?


Plus de
300 préparations
phytosanitaires sont
autorisées en bio
. Parmi les plus connus : Spinosad, Soufre, Pyréthrines, Hydroxyde et Oxychlorure de cuivre, Bouillie bordelaise, Deltaméthrine, Bacillus thuringiensis, Virus de la granulose du carpocapse, Virus zymv-wk, Phosphate ferrique, etc.

Comme pour l’agriculture conventionnelle, les préparations bio sont concernées par le
plan Ecophyto
qui vise à réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Seuls les produits jugés
les moins néfastes
voient leurs autorisations maintenues.

Les pesticides bio doivent être extraits directement de la
nature
(plantes, bactéries, minéraux, etc.). Les mêmes molécules synthétisées en laboratoire ne seraient donc pas bio. Cependant l’origine seule des pesticides ne garantit pas qu’ils soient
moins dangereux
, « naturel » n’est pas inoffensif :
La
toxine botulique
est 100% naturelle et pourtant
2 à 3 millions de fois plus puissant que le cyanure
.
Des produits 100% naturels comme le
lisier
de porc ou le
fumier
de vache par exemple sont reconnus responsables d’une part essentielle de la
pollution par les phosphates et les nitrates
.


Les pesticides bio sont tout autant
pesticides
, et pas moins nocifs que les autres :
La
bouillie bordelaise
, le pesticide le plus utilisé en bio (un mélange de sulfate de cuivre et de chaux) peut entraîner une
accumulation de cuivre
dans les sols, il est non biodégradable et globalement toxique pour la biosphère. Il est
dangereux pour les organismes aquatiques
, et
reprotoxique
. La réglementation autorise 6 kg/ha/an en agriculture bio. La bouillie bordelaise est l’alternative bio au Mancozèbe, le fongicide synthétique classique, qui est pourtant
deux fois moins toxique que la bouillie bordelaise
(DL50 de 5g/kg contre 2g/kg).
Le
cuivre
est une substance on ne peut plus naturelle qui reste un des pesticides les plus utilisés en bio. En dose importante, elle provoque de nombreux désagréments dont le
cancer du foie
. A noter que le cuivre n’est
pas biodégradable
, le sol n’est plus cultivable si on en met trop. 21 000 tonnes de cuivre et de soufre sont utilisées par an.
La
roténone
, un insecticide extrait de plantes tropicales, était utilisée largement en agriculture bio en France jusqu’en 2011 (par dérogation) alors qu’elle a pourtant été interdite par l’Union Européenne en 2008. La roténone a un effet
neurodégénératif
et augmenterait le risque de développer la maladie de
Parkinson
, elle présente des risques d'effets néfastes pour l'enfant pendant la
grossesse
, et des risques possibles d'altération de la
fertilité
.
L’
huile de neem
(azadirachtine), autorisée au niveau européen, est
toxique pour les abeilles
à des concentrations 50 fois inférieures à celles autorisées en bio. Il est aussi perturbateur endocrinien.
Le
Spinosad
(un mélange de toxines bactériennes) est également
neurotoxique pour les abeilles
et les invertébrés marins.





Le bio est-il meilleur ?



En matière de
qualité nutritionnelle
:
Selon les
revues de synthèse françaises
(rapport AFSSA 2003 revu en 2010 -
334 études
prises en compte, rapport INRA 2013) : Il y a
similarité qualitative
des produits conventionnels et bio. Il y a quelques
différences mineures
de composition chimique
sans impact nutritionnel ou sanitaire significatif
. Les fruits bio sont plus riches de 10 à 15 % en antioxydants (polyphénols), mais pas en caroténoïdes, les céréales bio sont plus pauvres en protéines, il y a des tendances à des teneurs un peu plus élevées en vitamine C, magnésium, fer dans certains fruits ou légumes bio.
Selon des
revues systématiques
britanniques et américaines (Dangour et al. 2009, Smith-Spangler et al.2012) : Il n’y a
pas de différences significatives
de composition chimique.
Selon une
étude expérimentale danoise
sur plusieurs sites et sur deux ans (Jensen et al. 2013) : A stade de maturité comparable (facteur de variation le plus important), l’
influence
de l’
année
, du
lieu de culture
et de la
variété
est beaucoup plus forte que celle du mode de production bio ou conventionnel.
Selon la
méta-analyse
du projet QualityLowInputFood en 2014 (M. Baranski et al. British Journal of Nutrition, 112, 794-811) (
343 études
prises en compte) : Il y a des teneurs plus élevées en
antioxydants
des fruits (polyphénols), des teneurs
moindres
en
cadmium
pour les céréales, et en résidus de
pesticides de synthèse
. Pour tous les très nombreux autres constituants analysés, les écarts ne sont
pas significatifs
ou sont
sans impact nutritionnel
(pas de différence concernant les minéraux et oligoéléments des légumes, notamment magnésium et fer, la vitamine C des fruits, les nitrates, etc.). Une tendance observée à moins de vitamine E en bio (teneur plus faible de 15 %). Plusieurs points cependant font que l’étude est controversée :
Ses
18 auteurs
sont tous
militants
ou sympathisants connus de l’agriculture biologique, notamment Carlo Leifert et son équipe de l’université de Newcastle.
La teneur moindre en
résidus de pesticides de synthèse
est logique puisque seul les pesticides « naturels » sont autorisés en bio. Ce sont ces derniers qu’il aurait fallu viser dans l’étude.
Le résumé met l’accent sur des écarts de teneur importants (jusqu’à 69%) pour certains
antioxydants
, mais quand on regarde la totalité des antioxydants, l’écart n’est que
de 17%
pour les fruits, et non significatif pour les légumes.
Avec un
régime alimentaire
européen classique, les antioxydants sont apportés pour 40% par le thé, le café, le chocolat, et les fruits ne participent que pour 5%. Une augmentation de 17% de cette part de 5% revient donc finalement à une
contribution à l’effet antioxydant par les fruits bio
de : 17% de 5%,
soit 0.85%
.


En matière de
santé
:
Selon une large
étude prospective
menée pendant
9 ans
sur plus de
600 000 femmes
de plus de 50 ans par des épidémiologistes de l’université d’Oxford (Bradbury et al. 2014) :
La consommation d’aliments bio n’a
pas d’influence sur l’incidence des cancers communs
.
On peut noter qu’
il y a 70 ans
tout était bio
, et pourtant les gens ne mourraient pas à plus de 80 ans comme aujourd’hui, mais
à 65 ans
(bien sûr, ce constat n’est en rien un argument valable pour ou contre le bio, trop de choses ont changé par ailleurs).


En matière de
goût
:
Il faudrait pouvoir comparer des
produits équivalents
, mêmes espèces ou races animales, même alimentation, même durée et condition d’élevage, et surtout les comparer
à l’aveugle
. Par exemple un poulet « label » élevé en extérieur pendant 80 jours et nourri au maïs aura forcément de
meilleures qualités gustatives ou nutritionnelles
qu’un poulet coûtant 5 fois moins cher, et élevé sur 40 jours avec des aliments bas de gamme. Pour autant, la différence est-elle due au
mode de production
, ou au label bio ?
Quelques données factuelles, concernant le goût :
En circuit court, le bio bénéficie plus souvent d’une
cueillette à maturité
, contrairement à ce qui peut se faire en grande distribution où les produits doivent pouvoir être manipulés sans trop de perte.
Les tests en aveugle montrent que les
variétés anciennes
ne sont pas les plus appréciées, contrairement à un préjugé bien installé, car elles ne sont pas assez fermes.
La meilleure tomate au monde (test
gustatif
à l’aveugle sur 500 personnes) n’est pas bio mais OGM.





Le bio est-il un achat rationnel ?


Est-il raisonnable d’acheter un
vin bio
, en moyenne
35% plus cher
, afin d’éviter un pesticide éventuellement
classé cancérogène 2A
et présent pour
moins d’une partie par million
, alors que le vin lui-même contient 13% d’alcool, c’est-à-dire un produit
classé cancérogène 1
, à hauteur de
130 000 parties par million
?
Pesticide (éventuellement classé 2A, « cancérogène probable ») :
00 000 000 00
0,300 ppm
Ethanol (classé 1, « cancérogène avéré ») :
000 000 000 000 000 000 000
130 000,000 ppm

Si on compare ces deux facteurs de risque, on s’aperçoit qu’il y a
des centaines de milliers de fois plus de cancérogène avéré dans le vin que ce fameux pesticide que l’on souhaite éviter !


Un comportement rationnel si l’on s’inquiète du cancer au point de craindre les pesticides, est d’
appliquer cette même prudence à l’éthanol
, et donc de
ne pas boire plus d’un petit verre de vin tous les 10 ans
.

Détail des calculs :
En moyenne, les
teneurs détectées
de
pesticides dans le vin
sont de l’ordre de
0,3 mg/L
(0.3 ppm) :
Source : Etude Dubernet 2015, analyse de 860 vins, Le cumul des concentrations moyennes (mg/L) des 5 principales molécules pesticides est de 0.252 mg/L (page 5, Boscalid 0,009 mg/L, Carbendazime 0,059 mg/L, Fenhexamid 0,075 mg/L, Phtalimide 0,083 mg/L, Pyriméthanil 0,026 mg/L, soit un total cumulé de 0.252 mg/L). Ce chiffre est arrondi à 0.300 mg/L pour prendre en compte les cas de figure hors 80% (page 4).
En moyenne, un
vin
c’est 13% d’alcool, soit 130g par litre, c’est-à-dire
130 000 ppm
(1 ppm = 1 mg/kg).
Dans le
vin
, il y a
433 333 fois plus d’éthanol
que de pesticides (130 000 / 0.3). Pour arriver à la même dose de produit cancérigène que celle contenue dans un seul verre de vin de 15cl, il faut ingérer 433 333 portions alimentaires de 15g, soit, à raison de 2kg d’aliments par jour, une décennie d’alimentation (et sans doute beaucoup plus, sachant que les teneurs moyennes en résidus de pesticides dans l’alimentaire sont généralement très inférieures à celles constatées pour le vin).

Quelques précisions :
Dire qu’acheter un vin bio permettrait d’éviter les pesticides est inexact, puisque la viticulture bio utilise largement le sulfate de cuivre, la bouillie bordelaise, et d’autres pesticides bio.
La comparaison n’est de base pas équitable : contrairement à l’éthanol, aucun des pesticides actuellement autorisé en culture vivrière n’est classé cancérigène classe 1 (avéré).





Le bio est-il exempt de problèmes ?


Le bio est lui aussi sujet à des
dépassements de LMR
(limites maximales de résidus de pesticides).
D’après le rapport EFSA 2010 (p105, §4.6.2), sur 3571 échantillons bio,
0.8% sont en dépassement
de LMR. Il est d’ailleurs à noter que pour ces dépassements, 25 concernent même des pesticides non autorisés en bio (et à cette teneur, il est exclu que ces dépassements soient dus à des « contaminations accidentelles »).
En 2002, une étude italienne a mis en évidence la présence de
roténone
dans de l’huile d’olive bio, avec un taux de contamination de l’ordre de 500 ppb, soit un dépassement de plus de
10 fois la LMR
.


Les chaînes de production du bio sont soumises aux mêmes
risques sanitaires
que pour le conventionnel, et les produits bio font eux aussi l’objet de
rappels
pour des
contaminations
à E. Coli, aux Salmonelles, etc.
En 2011 en Allemagne, une épidémie de diarrhées mortelles est due à une contamination à
E. Coli
d’un germe bio (fertilisation par des matières fécales animales, et traitements biocides efficaces tel eau chlorée et irradiation interdits en bio). On dénombre
3000 malades, 800 dyalisés à vie, 50 décès
.
En 2012 en région PACA, une série d’
intoxications alimentaires
est due à des résidus de
datura
(hallucinogène) dans de la farine de sarrasin bio.
Les saumons frais bio vendus en Allemagne sont plus contaminés aux
métaux
et/ou
dioxines
, PCB et pesticides que les non bio (sans toutefois dépasser les LMR).





Le bio est-il écologique ?



La
perte de productivité
due aux maladies, mauvaises herbes et insectes est de
20 à 30% en moyenne
sur des exploitations bio (jusqu’à
60% pour certaines céréales
, blé, orge) ce qui fait autant de surface arable supplémentaire à exploiter, donc plus de ressources consommées (eau, énergie, traitements, etc.), plus de labour, donc d’érosion des sols, plus de carburant donc d’émission de CO2. L’utilisation de
pesticides « naturels »
implique également qu’il faut consacrer des
surfaces agricoles supplémentaires
pour faire pousser les végétaux dont on les extrait.
Pour le blé tendre, la
perte de rendement
(données FranceAgrimer 2015) est de
64%
. Le coût en ressources supplémentaires se traduit en un prix de vente plus élevé (400 €/t pour le blé bio contre 150 €/t pour le blé classique).
L’
augmentation des surfaces cultivées
n’est pas sans incidence. Actuellement déjà, plus d’un tiers des surfaces émergées sont utilisées pour des activités agricoles (cultures et élevages) et l'agriculture produit
31% des gaz à effet de serre
. De façon mécanique, l’
expansion des activités humaines
est tout simplement le
premier facteur de perte de biodiversité
: plus de 60 % des animaux sauvages ont disparu depuis 1970, il n’y a plus que 4% des mammifères sur terre qui sont des animaux sauvages. L’humain se développe et étend son périmètre continuellement, même dans le désert : Las Vegas a multiplié sa taille par 5 en 40 ans. Promouvoir et vouloir généraliser un mode de production qui nécessite de 20 à 60% de surface supplémentaire n’est pas écologique.

La généralisation du bio pourrait conduire à
d’autres types de problèmes
que ceux actuellement rencontrés :
Le bio n’occupe actuellement que 5% des surfaces cultivées. On peut considérer qu’il profite du 95% des autres champs, cultivés en conventionnel, et dont les traitements
freinent la prolifération des ravageurs
(de même qu’en se faisant vacciner on participe à la protection de nos proches). Un combat affaibli contre les ravageurs pourrait se traduire en une pression de prédation et des
infestations massives
, des pertes de rendement, des campagnes de traitement coûteuses.
Les
mycotoxines
(fumonisines, ochratoxines, patuline, ergot du seigle) s’accumulent dans les plantes en cas de prolifération de moisissures. Ces champignons microscopiques s’implantent grâce aux perforations des insectes sur les feuilles et les tiges des végétaux et sécrètent des toxines qui seront transmises à l’homme. Elles sont potentiellement cancérigènes, néphrotoxiques, tératogènes, immunotoxiques, neurotoxiques.
L’
ergot du seigle
est un champignon qui contient la molécule du LSD, il est neurotoxine, des générations de paysans en ont été victimes. L’ergot du seigle dans le pain est sans doute responsable en 994 de 40 000 morts.
Le maïs biologique contient nettement plus souvent des
fumonisines
que le maïs conventionnel.
Il y a 10-15 ans, le
Danemark
était
autosuffisant en blé
, puis a passé toute sa production de blé en bio. Ils n’ont pas su contrôler le risque de
mycotoxines
et
importent aujourd’hui 80% du blé
qu’ils consomment.
En bio, le
soufre
et le
cuivre
ont une
rémanence
(durée d’action au sein de la plante) plus courte. Ils doivent donc être
traités plus souvent
, avec le risque de
rendre le sol infertile
. Une étude INRA de 2013, montre que les arboriculteurs bio peuvent traiter
jusqu'à 29 fois
leurs vergers de pommiers bio.





Le commerce bio est-il éthique ?


Le monde du bio se distingue régulièrement par des
procédés marketing
plus que
discutables
, en présentant des scénarios exagérément
alarmistes
, des affirmations erronées,
trompeuses
, des
omissions
ou négligences répétées, et tout un arsenal de
sophismes
.
La communication
anxiogène
y est largement utilisée, car c’est en effet un puissant moyen de
manipulation
(la panique éteint notre esprit critique et ordonne à notre cerveau des réponses réflexes, irréfléchies). Et pour cela rien de mieux par exemple que de mettre en scène des enfants : « des pesticides dans les couches culottes », « des perturbateurs endocriniens sur les cheveux des enfants ».
On observe aussi une tendance à se
positionner
en
victime
, on se proclame
lanceur d’alerte
, mais force est de constater en regardant les faits, que la crédulité et les bonnes intentions des militants servent surtout le profit des grosses entreprises, et que dans ce commerce de la peur, c’est le consommateur et l’intégrité intellectuelle qui sont bafouées.
Parmi les procédés :
Faire peur avec des noms de produits «
chimiques
», passant sous silence que tout est chimique, et qu’une fraise 100% naturelle contient 100% naturellement des centaines de molécules, dont acide aspartique, phénylalanine, 2.5-dimethyl-4-hydroxy-2h-furan-3-one, méthionine, 1-butoxy-1-ethoxyethane, et toutes celles appelées communément dans l’industrie E236, E296, E160A, E140, E210, etc.
Faire passer pour des « études » des
échantillons faibles
et non représentatifs (20 échantillons pour des pesticides alors que l'EFSA en prend en compte 80 000 dans sa dernière étude).
Rechercher
certaines molécules
de synthèse seulement, puis feindre de s’étonner que le bio n’en contienne pas (mais aucun des pesticides bio n’a bien sûr été testé).
Arriver à
présenter comme inadmissible
des résidus de pesticides alors qu’on est 3 000 fois sous la norme, ou qu’il faudrait ingérer 17 500 bols de muesli par jour pour que ça commence à devenir préoccupant.
Détourner et utiliser de façon non pertinente des normes
administratives qui ne s’appliquent pas à la sécurité sanitaire, mais qui permettent de titrer que l’on est à « 354 fois la concentration maximale admissible (CMA) tolérée dans l’eau pour l’ensemble des pesticides » alors qu’en réalité les concentrations maximales pour l’eau potable sont définies pour chaque pesticide par la VMAX (valeur sanitaire maximale) et que ces concentrations autorisées sont 90 000 fois plus importantes ! (Exemple pris pour le glyphosate, VMAX de 9 000 µg/L).
Passer sous silence que certaines substances polluantes décriées sont
retirées du marché
depuis longtemps.
Dénigrer et appeler au
boycott
des produits non-bio (délit de dénigrement pour lequel Biocoop a d’ailleurs été condamnés à 30 000€ d’amende).


Rappelons également que
Générations Futures
n’est pas une « ONG indépendante », mais le partenaire de Biocoop, Bonneterre, Bjorg, Lea Nature, Eco Vert, etc. dont la présidente est membre du conseil d'administration de Synabio, un
syndicat d'entreprises bio représentant 2,4 milliards d'euros
. Un montant qui leur permet une certaine capacité de lobbying, par exemple en travaillant pendant un an avec l’équipe de
Cash investigation
pour leur faire bénéficier de leur « expertise » et produire « Produits chimiques : nos enfants en danger » diffusé sur le service public.

Par ailleurs, le fait qu’un panier bio soit en moyenne 79% plus cher qu’un panier conventionnel (à cause du surcoût en main d’œuvre et des baisses de rendement) n’explique absolument pas pourquoi les
marges
sont en moyenne
96% plus importantes sur le bio
. Voilà qui sème le doute sur le fabuleux sens moral et les motivations altruistes des distributeurs.





Du lobbying bio ?


Certains organismes sont chargés de défendre les intérêts du bio, principalement par du lobbying, mais il arrive également que des conflits d’intérêt existent entre le bio business et certains chercheurs.
Parmi les acteurs majeurs du lobby bio :

L’
Organic Trade Association
(OTA).
Une association américaine qui réunit 7000 acteurs du bio. Elle œuvre pour la promotion du bio et exerce son lobbying grâce au « Organic Political Action Committee » qui soutient les candidats politiques alignés sur les objectifs du business bio.
Elle est présidée par
Melissa Hughes
(également à la direction d’
Organic Valley
, une coopérative bio de près d’un milliard de dollars de ventes en 2014).
Elle s’appuie depuis 15 ans sur « The Organic Center » pour produire des études scientifiques.

The Organic Center
(TOC).
Une association à but non lucratif créée en 2002 par plusieurs membres du conseil d'administration de l’OTA (Katherine DiMatteo, Mark Retzloff, Gene Kahn et
Theresa Marquez
directrice marketing d’
Organic Valley
)
Sa mission est de « mener et rassembler de la science crédible factuelle sur les effets sanitaires et environnementaux de l’agriculture bio et communiquer les résultats au public » c'est-à-dire produire ou recenser de l’information scientifique favorable au bio.
Elle est présidée de 2002 à 2014 par
Mark Retzloff
(directeur d’
Aurora Organic Dairy
, le premier producteur de lait et beurre bio américain, une entreprise constituée de six fermes géantes de 3500 à 7900 vaches chacune).

Cet organisme scientifique perçoit ses revenus de différentes manières :
Par les dons de ses « Cornerstone Donors » (les contributeurs à plus de 50 000 $), soit une vingtaine d’entreprises bio (dont les principaux acteurs américains de la filière,
Organic Valley
,
Aurora Organic Dairy
, d’immenses fermes bio,
Stonyfield Farm
, racheté́ en 2001 par Danone) et une dizaine de dirigeants du bio business.
Par des « donations » (par exemple, 30 000 euros, accordée par
Simply Organic
, pour « rechercher s’il y a un lien entre le désordre d’effondrement des colonies d’abeilles et l’utilisation de pesticides »).
Par l’organisation de son gala annuel de collecte de fonds, l’
Annual Benefit Dinner
, afin de « lutter contre les études anti bio financées par l’agriculture chimique et pour financer de nouvelles recherches pionnières en bio (Cf. l’invitation au gala du 10 mars 2016) ».
Par des
fonds publics
(par exemple en 2008, sur un projet privé-public d’étude sur « la santé des vaches dans les fermes bio et conventionnelles » mené par des scientifiques des universités Cornell, Wisconsin-Madison et de l’Oregon).

Sont membres de son conseil scientifique :
Carlo Leifert
, directeur du Tesco
Centre for Organic Agriculture
à l’Université de Newcastle en Grande-Bretagne, une organisation dédiée à produire des articles en faveur du bio et initialement créé grâce à une subvention de 400 000 livres de Tesco (qui comptabilise 57% des ventes de bio en 2014). Le centre est rebaptisé
Nafferton Ecological Farming Group
en 2004.
Il publie en 2014 une étude montrant des concentrations en antioxydants plus élevées en bio, en 2016 une étude montrant que le lait et la viande bio contiendraient 50% de plus d’oméga 3, et co-signe une des plus célèbres études en faveur du bio. Ces études sont controversées (voir « Le bio est-il de meilleure qualité nutritionnelle ? »).
Gilles-Éric Séralini
, militant anti OGM, administrateur du CRIIGEN.
Il publie en 2012 une étude montrant que des OGM (maïs Roundup-Ready) sont cancérigènes. L’étude est retirée pour « mauvaises statistiques, protocole expérimental inadapté, mauvaises conclusions » (voir « Plus en détail ; l’étude de Gilles-Éric Séralini »).
Charles Benbrook
, militant anti OGM notoire, directeur scientifique de TOC (percevant entre 2004 et 2012 plus d’un million de dollars de rémunération), consultant à son compte depuis 1990 à travers son entreprise
Benbrook Consulting Service
. Depuis 2012, il reste conseiller scientifique, mais occupe un poste plus discret à l’université́ de Washington State, où ses recherches sont toujours financées par le bio business (Organic Valley, Whole Foods, Stonyfield, United Natural Foods Inc.). Il a réalisé́ pas moins de vingt rapports vantant les qualités des aliments bio et fustigeant OGM et pesticides. Ces études sont également sujettes à controverse, par exemple Charles Benbrook calcule que les OGM augmentent le recours aux pesticides de 7% aux États-Unis alors qu’une analyse internationale de 2014 calcule que les OGM diminuent le recours aux pesticides de 37%. L’étude de Benbrook fait du « cherry-picking », elle ne prend en compte qu’une partie des insecticides.

En France également, on constate que les ONG bio-militantes ne sont pas indépendantes :
Générations futures
est présidé par
Maria Pelletier
, administratrice de
Synabio
(le syndicat national bio) qui touche des subventions de
Léa nature
,
Biocoop
,
Botanic
,
Distriborg
,
Ecocert
.
Faucheurs d'OGM
,
Inf'ogm
,
Bio consom'acteurs
,
Foodwatch
fonctionnent sur la base de subventions du lobby bio.
Le
CRIIGEN
est sponsorisé par diverses fondations (
Léa Nature
,
Ekibio
, etc.) et par
Carrefour
(qui a siégé 10 ans conseil d'administration).


Concernant le
pouvoir des lobbies
, comparons les
capacités financières
:

Les chiffres d’affaire en France :
Biocoop (2014) :
000 000 000 000
657 000 000 €.
Naturalia (2015) :
00 000 000 000
157 339 900 €.
Les Nouveaux Robinson (2014) :
0
43 539 500 €.
Monsanto France (2015) :
00 000
262 189 500 €.

Les chiffres d’affaire aux Etats-Unis :
Whole Foods (2016) :
000 000
15.724 milliards $.
Monsanto (2016) :
00 000 000
13.502 milliards $.

Le premier distributeur bio français fait à lui tout seul plus que Monsanto, idem aux Etats-Unis.
Le bio a des capacités de lobbying supérieures à celles de Monsanto, ils ne sont pas le David contre Goliath tel que régulièrement présenté.





Monsanto


Il n’est aucunement question ici de faire l’apologie de Monsanto. Ça n’est évidemment pas une entreprise à but non lucratif, et comme toute société, elle n’est pas exempte de stratégies commerciales. Pour autant, Monsanto est-il vraiment ce diable absolu, prêt à tout pour dominer le monde, quitte à détruire l’humanité ?

De
quelle société
parle-t-on ?

Monsanto est fondé en 1901 et a exercé sur de nombreux secteurs d’activité (chimie, pharmacie, agriculture, biotechnologies). Ils ont par exemple développé en 1991 le
Celebrex
,
le médicament contre l’arthrose le plus prescrit aux USA
.
Le Monsanto actuel concerne les activités de
biotechnologie
, qu’ils n’ont débuté qu’en 1978.
En 1996, ils acquièrent
Agracetus
(créé en 1981 et inventeur en 1991 du soja
Roundup-Ready
).
En 1997, la division produits chimiques industriels et fibres est transférée à la société Solutia.
En 1999, Monsanto fusionne avec le laboratoire pharmaceutique Pharmacia & Upjohn pour créer Pharmacia, elle-même rachetée par Pfizer en 2002.
La
division agriculture
de Pharmacia Corporation est cédée en 2000, c’est elle qui conserve le nom Monsanto (même si elle n’a plus rien à voir avec l’entreprise de chimie, mais garder le même nom permet une économie de 40 millions de dollars). Elle est finalement rachetée par Bayer en 2017.

Le Monsanto actuel tient donc pour grande partie l’ex-société Agracetus, fondée en 1981, et n’a pas grand-chose à voir avec l’agent orange (1950) ou le glyphosate (1974) même s’ils en ont gardé le brevet jusqu’en 2000.

Est-elle
dominante
, a-t-elle un
monopole
?

Il n’y a pas d’oligopole chez les semenciers. En 2015, il existe 248 entreprises productrices et 8076 distributeurs. Les 10 premiers producteurs se partagent 75% du marché mondial des semences (
Monsanto 26%
, DuPont 18%, Syngenta 9%, Vilmorin 5%, etc.). Un monopole est une situation dans laquelle un cadre juridique scelle une exclusivité sur un produit ou un service. En aucun cas Monsanto n'a un quelconque monopole.

Le
lobbying
.

Monsanto, comme toute société, défend ses intérêts et fait du lobbying. Le lobbying est une activité légale et professionnelle de plaidoyer auprès des décideurs politiques. Et même si on ne peut pas tout acheter (notamment le consensus scientifique, la souveraineté des états…) on peut tout de même s’essayer à comparer les capacités financières des entreprises en supposant qu’elles reflètent leurs capacités de lobbying :

Le chiffre d’affaire 2012 de
Monsanto
est de
13.5 milliards de dollars
, presque autant que Starbucks. En comparaison, Google fait 75 milliards et
Exxon Mobil 400 milliards
. Pourtant même Exxon Mobil n’a pas le pouvoir de se payer tous les scientifiques du monde pour dire que
le réchauffement global
n’existe pas. Si Exxon Mobil ne le peut pas, comment le pourrait une entreprise plus petite que Starbucks ?

Et puis, si Monsanto fait autant de lobbying pour orienter l’opinion publique ou museler les critiques, le moins qu’on puisse dire c’est que ça ne marche pas très bien…

Les
OGM
.

Monsanto est particulièrement stigmatisée pour son activité OGM, mais
99% des semences vendues par Monsanto en Europe ne sont pas OGM
, et Monsanto vend tout type de semences, y compris aux agriculteurs bio.
Monsanto est par ailleurs dépassée en
nombre de brevets OGM
par Syngenta, Basf, et DuPont.
La part des cultures OGM en Europe (2014) est de moins de 0,1%, le marché OGM concerne principalement les cultures de maïs et soja aux Etats-Unis. Le chiffre souvent mis en avant « Monsanto contrôle
90% des OGM
» correspond aux graines OGM produites en utilisant des technologies mises au point ou appartenant à Monsanto. Ces graines ne sont donc pas produites par Monsanto, et chaque entreprise ou semencier indépendant est tout à fait libre de produire le type de graine qu’il veut vendre à ses clients, eux même étant libres d’acheter et de planter ce qu’ils veulent. L’utilisation d’un type de graine sous licence (comme le mais MON810 résistant à un herbicide) est un choix, le marché est libre.





Les critiques



« Monsanto
brevette
le vivant ».

Toutes les entreprises de semences, y compris bio, brevètent leurs semences. Il n’y a rien de propre à Monsanto ou aux OGM.
Le
premier brevet
sur un organisme vivant (brevet de Pasteur sur une levure)
date de 1873
.
Aux USA, la brevetabilité du vivant est envisagée dès 1906 et en 1930 est mis en place le
Plant Patent Act
qui permet de breveter les plantes (soit déjà 40 ans avant les techniques OGM).
Dans le reste du monde, les brevets (
COV
) sont régis par l’
International Union For The Protection of New Varieties of Plants
, fondée en 1961 (soit plus de 30 ans avant l’introduction des premiers OGM alimentaires).

Un brevet est cependant soumis à
conditions
:
«
Un brevet est un
droit exclusif
sur un produit ou un procédé qui constitue en général une
nouvelle façon de faire
quelque chose ou apporte une nouvelle solution technique à un problème
».
Il faut que ce soit une nouveauté,
non existant dans la nature
(
interdiction de breveter le préexistant
).
Il faut que ce soit
industrialisable
(une mode qui consiste à porter une barbe hipster n’est pas industrialisable). A noter que l’industrialisation ne suppose aucunement le bon fonctionnement (on peut tout à faire breveter une machine censée permettre les voyages dans le temps).
Il faut que cela soit le fruit d’un
travail
(modifier une recette de crêpe n’est pas brevetable).
Un brevet dure 20 ans sauf exceptions. Pour les COV il dure 30 ans.

Les COV,
Certificats d’Obtention Végétale
, protègent les
variétés nouvelles de semences
, quel que soit le moyen d’obtention (sélection, hybridation, mutagénèse, OGM, etc.).
Elles
interdisent la revente
des semences (tout comme posséder Windows ou un DVD ne donne pas le droit de le dupliquer pour le revendre, c’est une propriété intellectuelle).
Elles imposent, en usage commercial, le rachat de graines ou le versement d’une
redevance
en cas de conservation et replantage pour la récolte suivante (tout comme une licence annuelle ne donne pas le droit d’utiliser un logiciel à vie, c’est une propriété intellectuelle).
La protection est en revanche soumise à certaines exemptions basiques : la recherche,
l’usage personnel
,
la subsistance
. Replanter ses graines est donc autorisé si c’est pour sa propre consommation (idem que pour un DVD, il peut être diffusé dans un cadre privé sans en tirer bénéfice, mais pas pour en faire une projection commerciale).

Pourquoi
existe-t-il des brevets ?
En moyenne le développement d’une nouvelle variété coute
135 millions d’euros
de recherche et
12 ans de développement
. En assurant la propriété intellectuelle limitée dans le temps d’une telle innovation, l’inventeur est assuré de pouvoir
rentabiliser son investissement
. Si un agriculteur achète des semences lui permettant une diminution de ses intrants, de l’érosion de son sol et du temps passé à le labourer, ou encore une augmentation de ses rendements, c’est bien parce qu’il participe a posteriori aux
coûts de développement
de ces semences. Sans quoi, celles-ci n’existeraient probablement pas. Aucun semencier ne force à acheter ses graines.
Les brevets finissent
nécessairement dans le domaine public à leur expiration
. La protection sur le soja OGM de Monsanto a expiré en 2015, il est donc libre de droits, et fait déjà l’objet de versions génériques.
Le contrat type Monsanto
précise clairement les contraintes
pour l’agriculteur (respecter la COV, pouvoir présenter les documents justifiants de l’achat des semences, possibilité d’inspection des parcelles). Ces clauses ne sont pas propres à Monsanto, ni aux OGM, ni même aux semences.
L’agriculture biologique autorise les semences issues de
l’hybridation ou de la mutagénèse
(pratiques induisant de fortes modifications génotypiques et phénotypiques) et faisant l’objet de brevets.

Pourquoi acheter
des graines sous brevet ?
Les semences sous brevet sont des semences de
première génération
(les fameuses
F1
vendues en jardinerie) et sont donc garanties de
présenter les caractères pour lesquelles elles ont été achetées
. Si elles sont replantées, il n’y a plus que ¼ des graines qui a les traits voulus (Cf. génétique mendélienne, loi de l’hérédité biologique des hybrides). A chaque nouvelle génération (nouveau croisement) les caractères avantageux de la première génération sont dilués et on perd en qualité de récolte. L’économie réalisée sur l’achat des graines n’est finalement pas profitable.
Ceux qui achètent des semences ont la garantie que les graines vont
germer
, dans le cas contraire ils sont
indemnisés
par les semenciers.
Les agriculteurs qui gardent des graines pour
replanter
doivent les sécher, les traiter et les stocker. A part dans les pays en voie de développement, plus personne ne ressème ses propres graines. La conservation des semis ne concerne plus que 15 à 20% de la production alimentaire mondiale (100 millions de fermiers en Amérique Latine, 300 millions en Afrique, 1 milliard en Asie).
Les semences sont un des aspects les
moins coûteux
de l’agriculture.

Les agriculteurs ont le
choix
dans divers catalogues de produits, ils peuvent acheter des semences traditionnelles, libres de droits, les conserver à leur guise, il existe
des centaines d’entreprises de semences
(mais « libre » ne veut pas non plus dire sans contraintes, il est toujours nécessaire d’avoir une autorisation gouvernementale, notamment en passant par le catalogue officiel qui garantit la
sécurité alimentaire
).
Que la clientèle n'aille pas chez la
concurrence
prouve justement que
le producteur a un intérêt
à acheter des produits Monsanto.
Les fermiers ne sont pas seulement dépendants des semenciers, ils achètent leurs outils mécaniques, leurs véhicules, leurs produits à des tiers. Doit-on dire que les marchands de tracteurs forcent les agriculteurs à acheter leurs produits ? Pourquoi seules les semences poseraient un problème ?


« Le Roundup crée des
résistances
».

C’est valable pour n’importe quel pesticide. Le vivant étant en perpétuel mutation, ce sont, par définition,
les organismes les plus résistants qui survivent
et se multiplient. Il existe cependant des préconisations et des stratégies pour limiter les risques ou ralentir l'apparition des résistances.
Concernant le glyphosate (composé actif du Roundup), son mode de fonctionnement est tel que l'apparition de résistances est plus difficile qu'avec la plupart des autres herbicides. C’est paradoxalement ce qui a poussé certains agriculteurs à ne pas suivre les consignes et à l’utiliser au-delà des doses préconisées (en plus du fait que s’il est utilisé en association avec des plants OGM résistants « Roundup-Ready », il n’y a alors plus à se soucier de l’effet de l’herbicide sur la plantation elle-même).





Les mythes



L’
agent orange
.

L’agent orange est une
combinaison de deux herbicides commerciaux
déjà utilisés depuis des décennies avant qu’ils ne soient utilisés comme défoliant par l’armée américaine pendant la guerre du Vietnam de 1961 à 1971.
La composition chimique de l’agent orange était
spécifiée par le gouvernement
, ainsi que la manière de l’utiliser (périodes, lieux, modalités, doses) qui n’avait rien à voir avec une utilisation normale de ces herbicides.
Les sociétés qui l’ont fabriqué (
à la demande du gouvernement
, pour participation à l’effort de guerre, sous couvert du U.S. War Powers Act et Defense Production Act de 1950) étaient
Dow Chemical Company
(le premier à en avoir fabriqué),
Diamond Shamrock Corporation
,
Hercules Inc
.,
T-H Agricultural & Nutrition Company
,
Thompson Chemicals Corporation
,
Thompson-Hayward Chemical Company
,
Uniroyal Inc.
et
Monsanto Company
de 1965 à 1969 (alors spécialisée dans la fabrication de produits chimiques, le Monsanto actuel, la division agriculture de l’ex Pharmacia Corporation, n’ayant plus rien en commun avec l’entreprise de cette époque).
En résumé pour l’agent orange : Monsanto ne l’a
pas inventé
, n’a
pas choisi de le fabriquer
, n’a été
ni le seul ni le premier
à le fabriquer.

Par ailleurs c’est une vision
essentialiste
que de considérer une entreprise comme étant une entité immuable ayant une
volonté propre
. Les entreprises changent, sont rachetées, morcelées, le contexte évolue, les individus qui la compose sont remplacés, partent à la retraite, etc. Avec le même raisonnement on devrait aujourd’hui boycotter Renault pour avoir collaboré avec Hitler ou Siemens pour avoir employé des détenus des camps de concentration.

Le traumatisme de la guerre du Vietnam a cependant poussé les
vétérans américains
à vouloir trouver des responsables, notamment auprès des fabricants de l’agent orange.
Un
procès en action collective
impliquant des millions de vétérans et leurs familles s’est déroulé en 1984 devant le tribunal fédéral de première instance de New York, qui
n’a pas conclu à l’existence d’une faute
. Cependant afin d’éviter un procès long et complexe,
les sept fabricants
, dont Monsanto, ont convenu d’un accord de 180 millions de dollars à distribuer conformément aux attentes de Jack B. Weinstein, le juge américain ayant suivi les plaignants pendant 30 ans.
En mai 2009, la Cour Suprême américaine a confirmé ces décisions, refusant d’accorder des dommages et intérêts dans le cadre de procès sur l’agent orange.
La Cour Suprême a estimé que les sociétés n’étaient pas responsables des répercussions de l’usage militaire de l’agent orange au Vietnam
. Les fabricants, exécutant un marché public, mettaient en application les instructions du gouvernement.


« Monsanto fait du
lobbying pour le glyphosate
» (la molécule active du Roundup).

Monsanto a développé le glyphosate en 1970, et
le brevet a expiré en 2000
. Le glyphosate est donc une molécule
libre de droits
, tombée dans le
domaine public
, que tout le monde peut fabriquer.
Plus de
300 désherbants
à base de glyphosate et homologués pour la vente en Europe sont aujourd’hui commercialisés par plus de
40 sociétés
différentes. Le glyphosate est produit par au moins
91 industriels
dans
cinquante pays
(
53 producteurs en Chine
, 9 en Inde,
5 aux USA
). La
Chine
domine la production et le marché mondial.
Si Monsanto faisait du lobbying pour le glyphosate, ils seraient
les pires lobbyistes du monde
: ils utiliseraient leur argent à aider la concurrence, ce qui est absurde.
Continuer à
ignorer depuis 20 ans
que le glyphosate est libre de droits est la
preuve de la mauvaise foi des militants anti-Monsanto
.


« Monsanto
stérilise
le vivant ».

Les technologies existent. Les «
GURT
s (Genetic Use Restriction Technologies) », renommées « Terminator » par les activistes, permettent de produire des plantes dont les
caractéristiques sont modifiées en deuxième génération
.
Les V-GURTs (ancienne technologie) se développent normalement, elles possèdent un caractère avantageux (par exemple la résistance à un herbicide) mais la seconde génération est
stérile
.
Les T-GURTs (nouvelle technologie) se développent normalement, elles possèdent un caractère avantageux (par exemple la résistance à un herbicide) mais il
disparait à la deuxième génération
. En revanche la plante continue de donner des
graines viables
.

La technologie n’a initialement
pas été développée par Monsanto
mais par le gouvernement américain en collaboration avec le groupe « Delta & Pine Land » en 1998.
Le brevet a été acquis par Monsanto en 1999 (à la suite de son projet de fusion avec Delta & Pine Land concrétisé en 2007). Monsanto n'a
jamais commercialisé
cette technologie, et s’est même engagé dès 1999 à
ne jamais l’utiliser
.

Cette technologie de stérilisation des semences s’est développée à une période où le public avait des craintes sur la «
contamination
» possible par les OGM, et devait permettre de répondre aux inquiétudes sur la prolifération incontrôlée. Elle avait aussi l’avantage de contribuer à la traçabilité des OGM, tout en assurant aux semenciers la protection des investissements et des intérêts commerciaux.

Quelques remarques sur la stérilité :
Une plante stérile n’a
pas de descendance
, et donc ne transmet pas ses gènes. Même en cas de transfert horizontal de gènes (dont la fréquence est négligeable comparée à la fréquence de nouvelles générations), la particularité ne se transmettra pas. Penser que la stérilité puisse se transmettre dans la nature et mettre en péril le vivant n’a aucun sens.
Les fruits
sans pépins
(comme la banane) sont stériles. Ils sont replantés par bouturage (clonage).


« Monsanto intente des
procès abusifs
».

Monsanto ne fait de procès aux agriculteurs que pour défendre sa propriété intellectuelle (utilisation illégale ou contrefaçon de graines sous brevet) comme le ferait Windows, Marvel, Warner, etc.
Sur les centaines de milliers de clients de Monsanto, 144 ont été poursuivis entre 1997 et 2010, les procès ont été gagnés par Monsanto.
L’exemple de
Percy Schmeiser
est souvent cité comme le David contre Goliath dans une affaire de « contamination », pourtant il est avéré que Percy Schmeiser a volontairement contaminé ses champs afin d’obtenir du Colza avec 98% de gènes Roundup-Ready (ce qu’il a confirmé au procès, il pulvérisait en masse du Roundup pour tuer la quasi-totalité du champ. Ne survivaient que les souches résistantes, les Roundup-Ready). Son but était de revendre sa production de graines, il faisait des contrefaçons.
Monsanto reverse l’intégralité des gains de procès à des associations de bienfaisance régionales.
Si Monsanto avait réellement des pratiques non éthiques, la clientèle irait à la
concurrence
.


Patrick
Moore
.

Il est présenté comme un
lobbyiste
pour Monsanto. Dans une interview, il indique que boire du glyphosate n’est pas dangereux pour la santé, mais se rétracte quand le journaliste lui propose d’en boire un verre.
Moore est bien lobbyiste, mais n’est pas et n’a
jamais été employé par Monsanto
.
Il est bien sûr peu conseillé de boire un grand verre de glyphosate, tout comme il est déconseillé de boire de l’eau de javel, ou encore de manger 300g de sel ou 30g de noix de muscade (tous les deux mortels à ces doses).
Un producteur bio mangerait-t-il son compost si on lui demandait ?


« Monsanto décime les
abeilles
, les
papillons monarques
» (Cf. néonicotinoïdes).

La
population d’abeilles est stable
en France depuis 20 ans (1.3 millions de ruches) et en augmentation au niveau mondial (de 50 à 80 millions de ruches en 20 ans).
La mortalité n’est due que
pour 5% à des intoxications par pesticides
autorisés (et pour 69% à des maladies Cf. Varroa Destructor, et 14% à des mauvaises pratiques apicoles, source consensus INRA, CNRS, ANSES établi à la suite du dispositif gouvernemental de surveillance de mortalité).
On observe également parfois un
syndrome d’effondrement des colonies
mais il est dû à des changements dans l’environnement (urbanisation, inondations, ouragans, prédateurs).
Les
néonicotinoïdes
jouent donc un rôle mineur.
Quoi qu’il en soit, les néonicotinoïdes n’ont
pas été développés par Monsanto
mais par Bayer CropScience au Japon en 1985.
Par ailleurs, nombre d’autres pesticides,
non néonicotinoïdes
et utilisés en bio (azadirachtine, Spinosad, pyréthrine, etc.) sont
tout aussi toxiques
pour les abeilles.
Les
papillons monarques
meurent à cause de la rareté des
plantes asclépiades
.


« Les fermiers indiens se
suicident
à cause de Monsanto ».

Les suicides seraient imputables aux produits OGM, notamment le coton
Bt
(la faible concentration de Bt permettrait aux insectes de proliférer, causant des pertes agricoles menant les agriculteurs au suicide). Or
le nombre de suicides était déjà le même 6 ans avant l’introduction du coton Bt
, et toutes les études montrent que les suicides sont dus à des facteurs socio-économiques.
Une méta-analyse portant sur 144 études, montre que les cultures OGM ont pour impact l’
augmentation des rendements et des bénéfices
et la diminution des coûts et quantités de pesticides. Ce qui pourrait, au moins en partie, expliquer que le nombre de suicides a presque
diminué de moitié 4 ans seulement après l’introduction du coton Bt
.


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